L’architecte en charge de la reconstruction du plus vieux temple de Tokyo a opté pour le béton armé. Un choix audacieux.
Le plus vieux temple de Tokyo, le temple Senso-ji, est un lieu incontournable pour tous les touristes japonais et étrangers qui visitent la capitale nippone. Alors que c’est un monument très célèbre, l’histoire de son architecture est méconnue.
Le bâtiment actuel du pavillon principal date seulement de 1958. Détruit pendant la Seconde Guerre mondiale, il a été reconstruit en béton armé sur le modèle de ses prédécesseurs en bois. À l’époque, ce choix a provoqué la polémique : pourquoi l’architecte Minoru Ooka a-t-il choisi le béton armé ?

Minoru Ooka, spécialiste en architecture de bois
Minoru Ooka, ce n’était pas l’Auguste Perret* japonais. Bien au contraire. Avant sa mission à Tokyo, il avait été chargé de la restauration du temple Horyu-ji, le plus vieux temple en bois du monde, situé dans la région du Kansai au Japon. Il était sans doute l’un des meilleurs spécialistes de l’époque dans le domaine de l’architecture traditionnelle du Japon.
D’après M. Ooka, le béton armé – cette méthode innovante du 20e siècle – est moins coûteuse. Il a également insisté sur le fait qu’il ne voudrait jamais voir le Senso-ji détruit. Après les bombardements américains pendant la guerre, le temple et même la ville entière avait été réduits en cendres. Quels que soient les matériaux ou les méthodes utilisés, d’après l’architecte, ce qui compte, c’est la présence éternelle du monument.
Le nouveau défi du château de Nagoya
Le 23 mars 2017 a été un jour marquant dans l’histoire de l’architecture du Japon. Le conseil municipal de Nagoya a adopté le projet de budget pour la reconstruction du donjon du château. Ce projet audacieux a pour but de détruire le donjon actuel, trop dégradé, et de le reconstruire en bois d’ici à 2022. Construit en 1609 et détruit pendant la Seconde Guerre mondiale à cause des raides aériens, le château de la quatrième plus grande ville du Japon a été reconstruit en béton armé. Les citoyens souhaitaient que le symbole de la ville ne soit jamais détruit.
Presque 60 ans se sont écoulés depuis la reconstruction. La structure du château est désormais fatiguée. Le moment est donc venu de revoir le bâtiment à la lumière des nouvelles normes antisismiques. En fait, les bâtiments en béton armé construits juste après la guerre rencontrent le même problème. On a ainsi commencé à se dire que les structures en bois étaient finalement plus solides, même si elles ne sont pas à l’épreuve du feu. Les vieux temples et sanctuaires de Kyoto et de Nara, par exemple, ont survécu à beaucoup de séismes depuis le Moyen Âge.
Le nouveau projet colossal du château de Nagoya coûtera environ 50 milliards de yens (425 million d’euros). La proposition du maire n’a pas convaincu tous les citoyens. Mais les dés sont jetés. Et il faudra attendre quelques décennies pour savoir s’ils ont pris la bonne décision.
Quoi qu’il arrive, le château de Nagoya devra être toujours là pour continuer à être admiré par les habitants et les touristes, comme d’ailleurs le temple Senso-ji.
*Auguste Perret, architecte français du 20e siècle, est l’un des spécialistes du béton armé. Il a notamment été en charge de la r
